22 octobre 2020. Créée en 2014, La Grande Bibliothèque du Droit (GBD) fonctionne sur le modèle de Wikipédia. Elle est en ligne et gratuite (lagbd.org). L’Ordre des avocats a choisi d’offrir un accès au droit en simplifiant le chemin qui mène du citoyen aux textes juridiques.
A l’occasion de son 6e anniversaire, l’auditorium de la Maison du Barreau de Paris accueillait, en nombre restreint pour raison de Covid, les participants venus assister à deux tables rondes sur le thème « La justice à l’épreuve de la communication médiatique. »
Le Bâtonnier de Paris Olivier Cousi rappelait la genèse de cette bibliothèque collaborative voulue par le bâtonnier Pierre Olivier Sur et qui affiche une progression constante. Elle a été mise en place sous la conduite de maître Emmanuel Pierrat qui depuis veille sur son activité et l’anime pour un vrai partage du savoir en accès libre, direct et gratuit.
Le journaliste, auteur et grand reporter Mathieu Delahousse introduisait le sujet, plantait le décor, brossait de rapides portraits des acteurs d’un procès.
Il mettait en évidence que « Le journaliste cherche de l’information et non de la communication ? » Il soulignait que la presse est regardée par les juges et les avocats comme « une intruse qui tire le juge par la manche… » et… « Si elle reste à la porte… tant mieux pour le respect du secret. »
Françoise Hecquet ancien membre du Conseil de l’Ordre animait la première table ronde : « L’enquête à l’épreuve de la communication » évoquant l’article 11 et le secret de l’instruction. Elle réunissait (de droite à gauche) le procureur de la République de Pontoise Eric Corbaux, l’avocat du Barreau de Paris Eric Morain et la journaliste Anne-Sophie Martin spécialiste de l’affaire Xavier Dupont Ligonnès. Pour le procureur de la République Eric Corbaux qui est poursuivi par les journalistes en quête d’informations immédiates ou de validation d’informations se pose, entre autres, la question du « comment encadrer les conditions et garanties du secret de l’Instruction ? » La journaliste Anne-Sophie Martin s’étonnait du fait qu’il n’y ait plus de banc de presse dans le tout nouveau tribunal High Tech de Paris, lié à de plus en plus de restrictions et une rigidité accrue en matière de photos des gardes à vue. Cependant le secret des sources journalistiques demeure… L’avocat Eric Morain s’étonne de la publication d’informations avant que les auteurs des procédures en soient informés. Un avocat peut en être l’origine, mais il peut s’agir de fuite ou encore d’information obtenue en poussant un magistrat à communiquer. La difficulté va alors être de combattre les fausses informations trop vite obtenues.
Me Emmanuel Pierrat, responsable de la GBD animait la seconde table ronde « Le procès à l’épreuve de la médiatisation ». Morgane Tirel maître de conférences en droit privé à l’Université de Paris-Saclay avec son exposé « Le « procès médiatique » : quand les victimes préfèrent l’arène des médias à l’enceinte du Palais » démontrait le triomphe de la justice médiatique sur la justice de l’institution, notamment en matière de harcèlement sexuel avec MeToo. Une sorte de procès hors les murs tel que défini par Serge Guinchard se développe via les réseaux sociaux. On assiste ainsi à un dévoiement de la notion de victime. Pour Me Sophie Obadia défendre la victime, la partie civile c’est « aller porter la parole de la défense, recouper les informations, avoir le contradictoire, un débat … Alors que le temps judiciaire s’est allongé, le temps médiatique s’est accéléré provoquant un big bang… Twitter devient une salle d’audience pour un lynchage médiatique ». Lors du procès, la salle elle-même ou chacun vient avec son communiquant pollue le débat judiciaire. Me Jade Dousselin avocate pénaliste veille sur le secret de l’instruction, s’oppose aux fuites. « Nous sommes le bouclier de nos clients, » martèle-t-elle. Elle est consciente que « le besoin de transparence est global. Le citoyen le ressent... » Elle a parfois utilisé la médiatisation « pour faire monter des sujets dont on n’aurait jamais entendu parler ». Me Emmanuel Pierrat en tant que modérateur suggérait d’enlever les portables à l’entrée du Palais de Justice.
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