Avril 2020. Les Nautes de Paris ont choisi de vous transporter à la date du 14 avril 1900. Remontons 120 ans en arrière.
Ce jour là à Paris, on inaugure la cinquième exposition universelle sur le thème : Le bilan d’un siècle. Une centaine d’invités accompagne les officiels conduits par le président Emile Loubet et le commissaire de l’évènement Alfred Picard.
L’ouverture de l’exposition au public se fera le lendemain 15 avril ; 136 accès ont été prévus. Mais l’entrée vers laquelle tous convergent est la numéro 29, place de la Concorde, la Porte Monumentale.
Construite par René Binet, elle a une hauteur de 45 mètres, 3 arches de 20 mètres de large. Ses 16 guichets doubles de chaque côté offrent 32 entrées qui permettent de laisser pénétrer 1000 personnes à la minute soit 60 000 personnes à l’heure. 2000 personnes peuvent attendre à l’abri sous la coupole dominée par la Parisienne, la star de cette manifestation, créée par Paul Moreau-Vauthier. Elle porte un costume dessiné par Jeanne Paquin. Le soir, elle brille éclairée par des milliers de lampes électriques avec des cabochons bleus et jaunes or.
Malgré des mois de travaux, en trois ans, tous les pavillons ne sont pas prêts et on se déplace encore dans des gravats. On paie 1franc au guichet d’entrée, mais il faudra souvent mettre la main à la poche pour les attractions qui sont nombreuses.
Cette exposition universelle, la plus grande organisée à Paris s’étend sur plus de 216 hectares, de l’esplanade des Invalides au Champs de Mars ; au Trocadéro, sur les deux berges de la Seine, au bas des Champs-Elysées avec 104 hectares dans le bois de Vincennes pour une exposition sur les transports, l’agriculture et là se déroulent de nombreux concours sportifs pour les premiers Jeux Olympiques, organisés à Paris sous l’impulsion de Pierre de Coubertin. Le Comité International Olympique (CIO) est né en 1894, les premiers jeux se sont déroulés à Athènes, en 1896.
Le pont Alexandre III (45m de large, une seule arche de 107m ) a lui aussi été inauguré le 14 avril par le président de la République. Sa construction de 1897 à 1900 avait été suivie pas à pas par la presse, depuis que le tsar Nicolas II avait posé la première pierre, le 8 octobre 1896.
Ce pont, entre le 7e et le 8e, était un des grands axes de l’exposition. Il reliait les Invalides à l’avenue Nicolas II. Là face à face, se trouvaient le Grand Palais et le Petit Palais qui avaient remplacé le Palais de l’Industrie construit pour l’exposition de 1855. Ils étaient tous les deux dédiés aux Beaux-Arts.
CINEMA
La première projection des frères Lumière avait eu lieu au Grand Café, en décembre 1895. Le cinéma était partout présent. Les spectacles proposés étaient souvent liés à des mises en scène, des dioramas et/ou des panoramas qui nous font penser au Futuroscope de Poitiers. Les frères Lumière proposaient des projections sur un très grand écran (21mx16m). Un Cinéorama avait remplacé la toile peinte du panorama par une série de projections cinématographiques sur une toile blanche circulaire.
Au centre, une nacelle embarquait les visiteurs sous un plafond qui imitait l’enveloppe d’un aérostat ; sous la nacelle dix projecteurs donnaient l’illusion d’un voyage en ballon. Mais les projections ne sont pas sans risque. Fin des voyages, en août. Le Maréorama, lui donnait l’illusion d’un voyage maritime sur un pont de Steamer qui s’animait. Rue de Paris, le Photo-Cinéma-Théâtre de Paul Decauville proposait des projections cinématographiques d’artistes célèbres comme Sarah Bernhardt dans la scène du duel (Hamlet) ou encore la danseuse Cléo de Mérode.
La fascination des astres attirait vers le Globe céleste et ses étoiles, la sphère bleue et or était aux signes du zodiaque. La Grande lunette du palais de l’Optique, 60 mètres de long et 1,5 mètre de diamètre ne proposait pas de voir « la lune à un kilomètre » mais à 47 kilomètres sur un écran. Le grand kaleidoscope qui s’y trouvait sera racheté par le directeur du Musée Grévin qui propose depuis, le Palais des Mirages. Spectacles et parades offraient également une ambiance de fête foraine avec la Grande Roue de 106 mètres de haut, avenue de Suffren près du village Suisse, où elle restera jusqu’en 1937.
ELECTRICITE
L’éclairage au gaz était banni, seuls les éclairages à l’électricité étaient autorisés, d’où quelques zones sombres à la nuit tombée. Le Palais de l’Electricité abritait des chaudières qui chauffaient 200 000 litres d’eau transformés en vapeur et actionnant des moteurs accouplés à des dynamos qui produisaient du courant électrique. Le château d’eau et son grand bassin devant le Palais s’illuminait chaque soir. La Tour Eiffel était, elle aussi, éclairée à l’électricité car ouverte de 9h à 11h du soir. Il fallait prendre un ascenseur Combaluzier pour gagner le 1er (2 francs) puis un ascenseur Otis pour la 2e (1 franc) et enfin un ascenseur Edoux pour le 3e (2 francs). Là, du centre, un escalier en hélice conduisait au phare qui illuminait Paris et l’exposition, le soir venu. Le tarif était identique par les escaliers pour le 1eret le 2e, seul l’ascenseur desservait le 3e.
Rive droite, entre le pont de l’Alma et la passerelle Debilly (construite pour l’exposition), on se promenait dans le Vieux Paris , d’après des dessins d’Albert Robida, on y rencontrait des gens en costumes d’époque à l’abord des monuments du XIIIe au XVIIIe. Avaient été reconstituées, notamment la maison natale de Molière, celle de Nicolas Flamel, du libraire-imprimeur Estienne, du journaliste Théophraste Renaudot. A la Pomme de pin, on interprétait des chansons anciennes.
De nouvelles gares ont été construites, la gare d’Orsay, celle des Invalides.
La gare de Lyon a fait disparaître la prison Mazas qui faisait face à son premier embarcadère. Au sein de l’exposition, le chemin de fer électrique Decauville circulait sur une voie unique de 3 kilomètres, entre le Champs de Mars et les Invalides (tarif unique 25 cents). Il faisait une boucle. Son tracé était le même que celui de la rue de l’Avenir, la plateforme mobile actionnée par 108 moteurs, qui passait en continu en sens inverse sur un viaduc à 7 mètres de hauteur (tarif unique 50 cents sans limite de parcours).
Etonnant, ce trottoir était composé de trois plateformes, une fixe, et deux trottoirs roulants, l’un à 4 km, l’autre à 8 km. On accédait aux neuf stations du trottoir roulant par des escaliers et passerelles. Comme dans les précédentes expositions, on trouvait des fauteuils roulants, des pousse-pousse, des filanzanes, des chaises à porteurs.
Autre nouveautés 27 rampes mobiles, avec main courante mobile installées dans certains pavillons afin de permettre de passer d’un étage à l’autre ( 10 cents par visiteur, abonnement 20 frs pour toute la durée de l’exposition).
Pour se déplacer dans Paris on disposait, en 1900, des premiers fiacres automobiles, les ancêtres de nos taxis, les omnibus, les tramways, les bateaux à vapeurs, 3 services de bateaux-mouches dont celui des anciennes hirondelles avec des services spéciaux pour l’exposition de jour et de nuit.
Le métro ouvrait avec beaucoup de retard quelques stations, en juillet, place de la Concorde, Champs-Elysées et place du Trocadéro. Alma et Concorde ouvriront le 13 août 1900.
Les cartes postales marquent en 1900 un temps fort grâce au procédé photomécanique, la photo va remplacer petit à petit les dessins. Les différents pavillons ont chacun leurs cartes qui bénéficient d’un tarif unique d’expédition 10c pour la France et l’étranger. A cette époque, il n’était pas rare d’écrire chaque jour, le téléphone n’était pas encore entré en scène…
Nous arrêterons là ce tour d’horizon. Le 12 novembre, le rideau est baissé. Ce sont 51 millions de visiteurs qui auront rencontré 83 000 exposants dont 40 000 étrangers.et 43 pays représentés. Succès
Pour en savoir plus sur :
Le cinéma à l’exposition universelle de 1900, Revue d’histoire moderne et contemporaine, 1986https://www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1986_num_33_2_1356
L’Exposition 1900, guide pratique Conty sous le patronage des compagnies de chemin de fer, 1900
Sur les traces des expositions universelles, Paris, 1855-1937, par Sylvain Ageorges (Editions Parigramme, 2006)
Documents : Les Nautes de Paris
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