Paris 19h, le 15 avril 2019.
Nous sommes rue Mazarine.
Une fumée jaune passe au-dessus de l’Institut de France.
La fumée devient dense et plus noire.
Nous gagnons le pont des Arts.
La foule se presse.
Nous nous interrogeons.
« Ce ne peut pas être Notre-Dame ? »
Mais aucun doute n’est possible.
Le feu gagne en intensité, 19h13.
Les réseaux sociaux comme Twitter confirme la nouvelle, « Le feu lèche la flèche de Violet-le-Duc et gagne la toiture, les tours qui abritent les cloches sont menacées ».
La stupeur se lit sur les visages. Hallucinés, stupéfaits, certains s’accrochent à leur téléphone : « Je t’assure, c’est vrai, Notre-Dame brûle. C’est horrible… Ils disent que c’est un incendie involontaire… Tu y crois toi… »
De loin, on voit que le feu dévastateur gagne en intensité. Le secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts, Laurent Petitgirard vient de se garer devant l’Institut, ce soir il y a un concert à l’Auditorium. Les Nautes de Paris y sont conviés. Le musicien, secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts nous dit en descendant de sa voiture « Le feu s’attaque à la flèche. Elle ne tiendra pas. Elle menace de tomber… ».
Un hélicoptère vole au-dessus du sinistre. Les sirènes des pompiers convergent vers le parvis. Des motards passent en trombe…
La flèche tombe à 19h53 amplifiant l’incendie de toute la toiture alimenté par la charpente médiévale en chêne qui laisse dégouliner du plomb dans l’édifice où les pompiers s’activent pour sauver les trésors religieux.
Notre-Dame veille sur Paris depuis le XIIe siècle.
Sa construction a duré deux cents ans
Voulue par l’évêque Maurice de Sully pour remplacer une cathédrale romane devenue trop petite, avec l’accord de Philippe Auguste, la nouvelle cathédrale fera 122 mètres de long, 35 mètre de haut, mais il faudra près de deux siècles pour qu’elle soit finalisée en 1345, avec ses rosaces et des statues que l’on doit en partie à Pierre de Montreuil.
La première pierre est, officiellement, posée en avril 1163, par le pape Alexandre III. Le maître autel sera consacré en mai 1182. Sous le règne de Louis IX (Saint-Louis), Notre-Dame accueille la couronne d’épines du Christ (1239) et devient la paroisse des rois qui sont alors sacrés à Reims et enterrés à Saint-Denis. Ils s’y marient. 1572, Henri de Navarre (Henri IV) y épouse Marguerite de France (la reine Margot). En 1804, Napoléon s’y fait sacrer empereur et couronne son impératrice Joséphine. Les personnalités internationales s’y retrouvent pour les obsèques de nos présidents républicains, Sadi Carnot, Félix Faure, Georges Pompidou, le Général de Gaulle, François Mitterrand…
Notre-Dame a inspiré de nombreuses chansons.
On y a fêté nos victoires nationales, la fin de la guerre de cent ans, les victoires de Jeanne d’Arc. Elle devient sous la Révolution Notre-Dame de La Raison. Ses cloches ont sonné la Libération de Paris en août 1944, le général de Gaulle y a fait célébrer un Te Deum.
Violet-le-Duc l’a restaurée, entre 1845 et 1864, y ajoutant, en 1861, une flèche avec les statues des apôtres et des évangélistes et … sa statue. Le Baron Haussmann lui a offert un vaste parvis, démolissant les maisons de l’époque moyenâgeuse. D’autres restaurations y seront conduites par tranche. La façade et les tours ont été refaites entre 1990 et 2000. La dernière avait débutée en 2018.
Avec Notre Dame de Paris, Victor Hugo qui critiquait le mauvais entretien de la Cathédrale a écrit, en 1831, un roman immortel. Il a été porté à l’écran sur un scénario coécrit par Jacques Prévert, mis en bande dessinée par Walt Disney et en chansons par Luc Plamondon pour les paroles et Richard Cocciante pour la musique.
De nombreuses vidéos mises en ligne proposent des visites virtuelles pour combler le manque que nous ressentons tous. Saint-Sulpice assure le suivi liturgique avec les autres églises parisiennes notamment Saint-Roch -notre église- , elle abrite La Chapelle Saint-Nicolas dédiée aux « Nautes du port de la rivière de la Seine« , depuis 1217.
Notre-Dame au cours des dix siècles passés avait échappé aux destructions, aux incendies pendant la Révolution et la Commune mais aussi pendant les périodes de guerre, notamment lors des deux guerres mondiales (14-18 et 39-45). Ce lieu est l’âme spirituelle de la capitale. Son bâtiment hautement patrimonial devrait retrouver dans quelques années sa splendeur initial grâce à la mobilisation de tous. Il faut y croire, c’est une question de confiance.
