L’exposition « Des images et des hommes, Bâmiyân 20 ans après » au Musée national des arts asiatiques – Guimet sera à découvrir jusqu’au 21 juin 2021, dès que le musée pourra accueillir à nouveau des visiteurs.
En Afghanistan, la falaise de Bâmiyân est à environ 250 kilomètres de Kaboul, ses grands bouddhas ont été détruits le 11 mars 2001. L’exposition rend hommage aux hommes et aux femmes du site mais aussi à Joseph et Ria Hackin archéologues de Bâmayân, ralliés à Londres depuis l’Afghanistan, morts en mer en 1941.
L’Europe a découvert le site monastique de Bâmayân avec l’épopée de la Croisière Jaune, l’Expédition Citroën Centre-Asie en 1931. Georges Le Fèvre, l’historiographe de l’expédition a écrit « Le moine philosophe, disciple du Bouddha, a fui devant le mullah fanatique, mais persistent à se dresser les sublimes images de pierre, nées de la foi en un monde supérieur et inconnaissable, par delà l’ignorance nocive et le désir trompeur. Rien, jusqu’à présent, n’a pu détruire ces œuvres géantes, témoins d’un âge où se sont heurtées des conceptions apparemment contradictoires, bien qu’animées du même souffle divin. … » Ce souffle divin a été en partie éteint en 2001.
Le conservateur du Musée Guimet, directeur des fouilles françaises, Joseph Hackin fera visiter le site aux membres de la mission Citröen. Il exposera à Paris, en 1934, les antiquités qu’il a reçues en partage avec les autorités afghanes et rédigera le premier guide du Musée.
Les membres de la mission Citroën avaient rapporté des images qui montraient les visages effacés des grands bouddhas , à partir de la lèvre inférieure vers le haut, absents, comme arasés. Creusé dans la falaise de calcaire, le couple de bouddhas, l’un à l’ouest et l’autre à l’est, veillait chacun à une extrémité de l’immense centre bouddhiste.
Des masques en bois sculptés et peints couvraient sans doute ces visages en fonction des cérémonies, telle est la thèse retenue, dans les années soixante-dix, par l’archéologue afghan, Zemaryalaï Tarzi (né à Kaboul en 1939) qui a travaillé sur le site.
MARS 2001, LES DESTRUCTIONS
Septembre 1996, les Talibans s’emparent de Kaboul.
1998, ils sont à Bâmiyân.
Février 2001, la destruction des statues et des sanctuaires non islamiques est décrétée par le Mullah Omar. La communauté internationale et l’organisation de la conférence islamique se mobilisent, interviennent pour la sauvegarde de l’héritage préislamique d’Afghanistan. Le Metropolitan Museum of Art de New York, offre même de racheter les statues.
Mars 2001, les Talibans annoncent la destruction complète des bouddhas de Bâmiyân, des statues du musée national afghan et de celles des autres musées d’Afghanistan. La destruction des bouddhas filmée par Al-Jazira a fait le tour du monde. Les journalistes sont invités à constater sur place les dégâts, le musée de Kaboul est vide, à Bâmiyân les deux grands bouddhas ont été anéantis.
Les destructions du 11 mars 2001 à Bâmiyân, se sont déroulées malgré la mobilisation de tous. Les attentats du World Trade Center à New York, le 11 septembre 2001 ont généré un tel choc en écho ! Deux bouddhas, deux tours, deux mondes…
Présidente du Musée national des arts asiatiques-Guimet, depuis 2013, Sophie Makariou a mis en place au musée du Louvre un département des arts de l’Islam (de 622, date de l’hégire au XIXe siècle), dès 2002.
Le nouveau département du Louvre a ouvert ses portes en 2012.
Le siècle avait un an quand une onde de choc destructrice a secoué la communauté internationale. « L’atteinte au patrimoine des hommes et à la mémoire qui les enracine est reconnue depuis comme un crime contre l’Humanité. » L’idée de reconstruction ne semble pas possible actuellement.
Avec Pierre Cambon, conservateur en chef des collections de Corée, Pakistan, Afghanistan du MNAAG, une exposition a pu être préparée car le musée avait reçu en partage des éléments du site issus du chantier de fouille de la délégation archéologique française en Afghanistan, durant les années 1930.
Dès 1923, l’archéologue Joseph Hackin avait fait des recherches, des relevés de peintures à Bâmiyân qui deviendra un des plus prestigieux chantiers de la délégation archéologique française en Afghanistan. L’archéologue était directeur de la DAFA et conservateur du musée Guimet depuis 1923. Il a été le secrétaire d’Emile Guimet, fondateur du MNAAG.
Ce site Bouddhiste extraordinaire est à la croisée des mondes. Son couple de bouddhas géants sculptés dans la falaise dominait la vallée, à une altitude de 2 500 mètres. Celle-ci abritait des centaines de grottes, creusées ou aménagées, ornées de fresques splendides qui communiquaient entre elles. Elles témoignaient du croisement des influences indiennes, iraniennes, hellénistiques et centre-asiatiques. Le plus grand des bouddhas à l’ouest avait 55 mètres de haut, le plus petit à l’est 38 mètres. Avec son épouse Marie Hackin dite Ria, et l’architecte et archéologue Jean Carl, ils ont conduit les fouilles et reproduit les fresques qui décoraient les cavités.
Le plasticien et photographe, ancien pensionnaire de la Villa Médicis, Pascal Convert travaille sur la question de mémoire et d’oubli. Il a notamment réalisé, en 2002, le Monument à la Mémoire des Otages et Résistants fusillés au Mont Valérien, entre 1941 et 1944.
En 2016, à l’invitation de l’Ambassade de France à Kaboul, il va imaginer un projet artistique afin de commémorer la destruction par les Talibans des bouddhas de Bâmiyân. Il en a tiré un projet pour le pavillon français de la Biennale de Venise et le film Les enfants de Bâmiyân que vous pourrez découvrir dans le cadre de l’exposition. L’artiste présente un splendide Panoramique de la falaise de Bâmiyân et la Grotte sanctuaire de Bâmiyân détruite.
« Vous découvrirez ainsi les vestiges archéologiques, relevés de peintures et vestiges de peintures originales, les créations contemporaines de Pascal Convert, les films et les documents d’archives présentés (documents de fouilles, photos, lettre de ralliement des Hackin au Général de Gaulle), l’exposition raconte l’histoire du site de Bâmiyân et sa vitalité culturelle du 6ème au 13ème siècle »
Le Musée national des arts asiatiques-Guimet, 6 place d’Iéna, Paris 16e
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