Erik Desmazières, membre de la section de gravure de l’Académie des beaux-arts nous présente le lauréat 2018 du prix de gravure Mario Avati, Jan Vičar. Une sélection de ses travaux réalisés au cours des dernières années est présentée, au pavillon Comtesse de Caen, jusqu’au 13 juin 2021.
Jan Vičar,est un artiste tchèque. Il a une formation académique classique.
Il unit peinture et art graphique. Il produit des peintures graphiques, des gravures sensibles aux formes ethniques. Il expérimente des techniques non traditionnelles. Nous allons découvrir dans cette exposition des histoires, des récits très personnels. Ils sont faits de rencontres mises en images à la façon de tapisseries sur bois .
Nous sommes accueillis par sa dernière œuvre réalisée pendant la période de confinement Covid. Il a gravé l’intégralité, texte et illustrations d’une chanson populaire de son pays. La chanson s’affiche. Elle réunit ses huit couplets. Un homme dans son champ se fait attaquer par des chasseurs qui veulent ses vêtements « jusqu’à sa chemise » et le laisseront mort.
Plus loin voici des cavaliers du cycle « J’ai voulu être général, mais la guerre a été trop courte », (2014).
Chaque œuvre a une histoire. Ainsi en Afrique du Sud, lorsqu’il était à Cape Town, il a escaladé la Montagne du Diable, dans les nuages à 1000 mètres d’altitude. A mi-parcours, il s’est arrêté dans une grotte et là, il nous raconte « J’ai vu un homme dans la grotte de la Montagne du Diable » (2014). L’homme semblait habiter là. A son retour dans son studio, l’artiste grave la scène sur le sol en bois. L’homme semble demander « que faites-vous ici ? » ou peut-être « Qu’est-ce que je fais ici ? » Une petite fille de 8 ans, Thandiwe Mamacos est venue un jour graver avec un de ses couteaux un poulpe. Il est resté dans le décor et vous pourrez le voir.
Le bois est très présent dans l’exposition. Une série de matrices est posée au sol. On la relie à « L’église »aux teintes pastelles. Une petite fille est là. Elle cache sa poupée derrière elle. Elle était venue avec son école visiter l’atelier de l’artiste. Elle était restée, la dernière, fascinée par son travail, émerveillée. Sachant qu’elle ne reviendrait pas, elle emmagasinait de beaux souvenirs.
Il utilise le lino, le papier, des toiles, le bois, son burin et les encres d’imprimerie. Il réalise ses impressions de texte en typographie. Ses peintures graphiques, témoin de ses voyages à l’étranger ont joué un rôle important, notamment ceux fait en Afrique du Sud.
Certains le voient comme un globe-trotter, humain et artistique, du petit village tchèque de Mladkov. Il a traversé la Pologne, la Hongrie, l’Allemagne, Londres, Alger, Le Cap et Johannesburg en Afrique du Sud, il s’est aussi rendu aux États-Unis.
Jan Vičar présente un livre de bibliophilie, réalisé en France en 2018. Hold, 52 x 65 cm, 70 linogravures originales gravées à la main, le texte du poème de la poétesse américaine Sally Ball est composé à la main, imprimé en typographie, un tirage qui se fait à la demande pour 35 exemplaires, pages cousues et reliées.
Il démontre que nous détenons le pouvoir d’agir ou de ne pas agir après avoir parcouru ces pages qui utilisent les chiffres romains et n’hésite pas à évoquer le nucléaire dans un paysage idyllique de Nogent. Voici un constat, un avertissement, attention : « Il s’agit d’une méditation sur la fragilité de la terre et de l’écosystème humain, conséquence de l’activité délétère de l’homme sur son environnement. »
Vous finirez votre visite par l’œuvre la plus personnelle de l’artiste. Elle met en scène un de ses fils et a donné son titre à l’exposition « Un cœur dans la rivière » Je ne vous en dis pas davantage, à vous de le découvrir.
N.B. l’exposition se tient au pavillon Comtesse de Caen, 27 quai Conti, Paris 6e, du 20 mai au 13 juin 2021.
L’entrée est libre et gratuite, du mardi au dimanche de 11h à 18h.