Depuis le Moyen-âge et jusqu’à la première guerre mondiale, lorsqu’on parle de métiers d’autrefois, de petits métiers à Paris, on évoque les Cris de Paris.
Il s’agit des marchands ambulants qui pratiquaient la vente à la criée, petits paysans, journaliers cherchant des compléments de ressources. Chacun, chacune avaient une phrase d’appel chantante : « Navet, navet, navet » ; « Marchand de cerises, à la douce cerise, à la douce ».
« Marchand de gâteaux, ils brûlent, Ils brûlent, ils brûlent ». Des gâteaux faits par les commis de boulangerie avec le reste de pâte de la journée. Il y avait aussi les gaufres, les gâteaux Nanterre, une brioche qui a conservé son nom. Les gâteaux du Marchand d’oublies étaient faits la nuit, des beignets ronds percés et enfilés sur un bâton ou une corde. Ils sont devenus sous le 2nd empire des plaisirs car vendus avec des sucreries. « Marchande de plaisirs, voilà les plaisirs Mesdames, voilà le plaisir » installées près des parcs et jardins à l’heure où l’on promène les enfants comme le marchand de glace ou de Coco.
La loi tente d’encadrer cette corporation faite d’individualités.
Un édit royal de 1723 exige que les colporteurs sachent lire et écrire, qu’ils soient inscrits sur un registre de la généralité du lieu, et qu’ils portent une plaque distinctive ; mais la plupart des colporteurs, aussi analphabètes que peu enclins à payer les taxes liées à leur profession, sont inscrits comme « trafiquants » dans les actes notariés et paroissiaux. Ils échappent ainsi aux exigences mises en place.
Sous Louis XIV, il leur sera interdit de vendre des produits et marchandises réservées aux corporations organisées.
Ces itinérants, forains, musiciens, chanteurs de rue, artistes, écrivains publics, barbiers, arracheurs de dents et colporteurs comblent le vide du réseau ordinaire, celui des boutiquiers et du marché. Après quelques heures passées sur une place de marché, un revendeur peut partir sillonner les rues. Le revendeur n’a pas d’inscription fixe dans le temps et dans l’espace ; Il ne sait pas signer son nom. Il va à la rencontre du client potentiel. Le boutiquier lui n’a pas le droit de racoler.
Les marchandes de quatre saisons, car les femmes dominent le métier avec leur voiture à bras bénéficiaient de médailles réglementaires qui ne seront plus délivrées à partir de 1956. Les marchandes décédées ne pourront plus être remplacés. Leur activité cessera avec le déménagement des Halles où elles s’approvisionneront jusqu’en 1969. Elles instituaient une relation différente de celle de la boutique où l’on est client. Le marchand de légumes avec sa charrette proposaient choux, poireaux, carottes, navets.
Parallèlement, chaque légume était proposé séparément par d’autres confrères regardés comme des trafiquants hors la loi, avec chacun leur spécificité, marchand de pois, d’œufs, de fromage, de fruits : raisins, melon, cerises, oranges, citrons…
Ces revendeurs ont été les premier à sillonner les parties les plus extrêmes de la ville où seules habitaient quelques personnes.
Cette figure urbaine, criait les produits qu’elle colportait et qu’elle livrait dans les cours et parfois dans les étages.
Muni de son éventaire, de sa hotte, de son panier, de sa charrette à bras, le revendeur vendait souvent peu de choses à la fois, pas toujours de la meilleur qualité et de la première fraîcheur, pour échapper à l’impôt.
Vente itinérante de denrées secondaires
Ces professionnels représentent des séries de métiers plutôt que des professions organisées.
Ils offraient des services comme la « marchande d’allumettes, de l’amadou, d’zalumettes, des briquets, des brûle-tout », le rempailleur, l’étameur, le frotteur, le porteur d’eau, le raccommodeur de porcelaine, le carreleur de souliers, le « marchand d’habits, vieux habits, vieux galons, vieux chapeaux » ; les vendeurs de mouchoirs, de cartons, de paniers, de toile cirées, de parapluie et parasols, « marchand de chaînes, la sécurité des montres ».
« Rien ne se perd , rien ne se perd, tout se transforme » écrivait Lavoisier. Les chiffonniers récupéraient tout, notamment les vieux draps et tissus, les Loque et chiffons pour la fabrication du papier, dès le Moyen Âge. Ils approvisionnaient les papetiers. Mais cette profession récupérait la nuit, armé de crochet déjà tout ce qui pouvait être réutilisés. Le chiffonnier deviendra le fournisseur de l’industrie au XIXe siècle .
L’allumeur de réverbère a disparu avec l’arrivée de l’électricité.
Marchandes de plaisirs, les vendeuse de violettes, de muguet , de mimosa, de lilas, d’œillets, de roses, de gardénias selon les saisons, les bouquetières, vendaient dans la rue dans des quartiers, comme à Opéra, dans les salles de spectacles, à la terrasse des café et aux champs de courses. Elles étaient présentes dans tous les lieux où les messieurs pouvaient offrir des fleurs aux dames.
Le charmeur d’oiseaux des Tuilerie réunissait chaque jour son public. La chaisière veillait dans les parcs et jardins à ce que chacun paye son dû et la chaise sur laquelle il s’installait. Les marchands de journaux « Marchand de journaux, voilà le journal du soir, lisez le journal » ne vont plus au devant de leurs lecteurs. Les moyens de transports évoluant il y a eu des femmes cochers qui devaient maîtriser leurs chevaux au cœur d’une circulation parisienne désordonnée.
Une Chanson de Clément Janequin et Claudin de Sermisy : Les cris de Paris (1495-1560) a été Rééditée par Harmonia Mundi en 1982 et on peut la trouver sur Youtube. Les chants des métiers se succèdent mais seraient difficiles à identifier sans la partition qui permet de suivre les paroles.
De temps en temps de nos jours, les rues résonnent à nouveau de cris « Vitrier… Vitrier, » « Rémouleur, rémouleur, repasse couteau ciseaux » ancien « gagne petit à repasser ciseaux et couteaux ».
Et les marchands de marrons, il faudrait dire de châtaignes grillées sont toujours bien présents dès les mauvais jours. Les plages quant à elles connaissent tous les étés les vendeurs de beignets « chouchou , chichi, glaces».
Le rempailleur a trouvé sa place à proximité d’une église. Il veille ainsi sur la qualité des prie-Dieu.
L’orgue de Barbarie a fait de nouveaux adeptes. Le loueur de bateaux attend toujours les enfants près des bassins du Luxembourg.
Depuis la Révolution, les bouquinistes peuvent transmettre leurs boîtes de livres et gravures accrochées sur les quais tout au le long de la Seine. Joseph Gibert avait débuté comme bouquiniste quai Saint Michel.
Les derniers Forts des Halles sont désormais à Rungis.
Documentation:
-Les Nautes de Paris
-NYPL, Digital Collection
-Delcampe.fr/Simari28
-Gallica
Pour plus d’estampes et dessins des cris de Paris, voici quelques pistes :
–Cris de Paris, par Carle Vernet (1758 -mort en 1836)
-1853, Cris de Paris, n°1 –n°2 , dessins de H. Monnier, gravures de Birouste et Tamisier
–Petits métiers périodes 1653, Cris de Paris au XVIIe s, collection Michel Hennin
–Cris de paris Dessinés par M. Poisson 1774-1775
à suivre une vidéo sur les Vieux Métiers et Cris de Paris
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