Le 8 décembre 2021, Henri Ciriani s’est vu décerné le Grand Prix d’Architecture de l’Académie des beaux-arts, grand prix international, Prix Charles Abella° décerné́ à un architecte pour l’ensemble de son parcours, doté de 35 000 euros.
Une exposition de maquettes et dessins du lauréat est présentée au pavillon Comtesse de Caen (entrée libre et gratuite), jusqu’au 9 janvier 2022. En 2019, ce prix était attribué à Álvaro Siza Vieira qui déclarait parlant de sa profession : « Les architectes n’inventent rien. Ils transforment la réalité. »
Le prix a été décerné par un jury composé de membres de la section d’architecture de l’Académie des beaux-arts : Bernard Desmoulin, Pierre-Antoine Gatier, Dominique Perrault, Alain Charles Perrot, Aymeric Zublena et Jean-Michel Wilmotte.
Diplôme et trophée seront remis à Henri Ciriani par Bernard Desmoulin membre de la section d’architecture de l’Académie des beaux-arts (reçu sous la Coupole, le 29 septembre 2021) après une discussion sur son parcours, son oeuvre et ses idées qui ont fait école.
François Chaslin, correspondant de l’Académie des beaux-arts, animait ensuite une conversation avec Henri Ciriani qui déclarera entre autres : « L’architecture n’improvise pas (…) Nous voulions changer le monde et on nous a changé », soulignant que l’architecture c’est l’idée en formes que l’on se fait de la beauté que doit avoir une construction pour créer un lieu… Ainsi que la difficulté d’avoir quelque chose de nouveau.
Cet enseignant, considéré par certains comme un gourou a toujours veillé sur une cohérence entre la production personnelle et le discours pédagogique. Il travaille dans le sens de la solidité, la puissance de l’articulation des masses verticales et horizontales, la silhouette des édifices, des barres avec un jeu de pleins et de vides. Pour les intérieurs « les invariants », il travaille l’espace par des effets de lumière.
Né à Lima en 1936, dès 1960 au Pérou, Henri Ciriani construit des grands ensembles. Il rejoint la France en 1964. Il est devenu français en 1975.
Il a travaillé au Maroc avec André Gomis. Celui-ci l’appellera pour qu’il travaille et enseigne à ses côtés dans les locaux aménagés dans le Grand Palais. Il lui succèdera avec François Maroti. Des étudiants du monde entier suivront ses cours. Avec des étudiants Coréens d’UNO, ils exposeront à New York.
Il a créé un alphabet de l’architecture, qui rappelle que le A du mot architecture est une figure, un angle, une pyramide, un toit. A ses yeux, le fonctionnalisme de l’architecture sociale réduit l’architecture à un processus de rationalisation économique pour ne devenir que construction, « le malaise vient du fait que la beauté, plaisir produit par l’usage et la perception en est absente. »
En pleine conquête de l’architecture urbaine, à la recherche d’une famille différente, il atteste de la difficulté d’avoir quelque chose de nouveau. Une force fondamentale, vitale. Il a « formé un groupe avec des architectes costauds » influencé notamment par Le Corbusier et Frank Lloyd Wright.
Ses projets d’architecture, il les conçoit avec une énergie colossale, une force monumentale. L’architecture des villes nouvelles demeure expérimentale. Selon les subventions, les dessins acceptés font que l’architecte est dépourvus d’autorité. Alors il lutte « contre les villes modernes avec des bâtiments verticaux sans intérêt, si ils sont seuls si ils ne sont pas solidaires avec d’autres (…) Les villes nouvelles, les mégastructures présentent de nouvelles difficultés (…) La forme est importante (…) Certains architectes sont consternants en fabricant des tours consternantes » qui lui font penser à Beyrouth en ruines sous les bombes.
Il a réalisé deux musées, le musée départemental Arles antique pour lequel il a adopté un plan triangulaire et L’Historial de la Grande Guerre à Péronne « qui exprime le calme alors qu’il aurait, selon certains, du exprimer la douleur. »
Prix Charles Abella* du nom de l’architecte qui a construit, entre autres à Paris, l’immeuble art déco 12 rue Cassini (construit en 1930-1931) dernière planque de Jean Moulin président du Conseil de la Résistance, et le 53 av. Foch (construit en 1939) où ont habité les milliardaires argentins Anchorena, qui y recevaient de nombreux artistes dans les années 1940-1950.