Les Nautes de Paris vous proposent un rapide survol des lieux où les Parisiens faisaient la fête du boulevard Rochechouart au boulevard de Clichy et sur les pentes nord de la Butte. Nous vous invitons à un voyage dans le temps…
Montmartre, ses moulins, ses guinguettes attiraient les Parisiens qui aimaient faire la fête avant que le village derrière les barrières devienne, en 1860, une partie du 18earrondissement.
On y danse, on y danse !
Le moulin de la Galette, rue Lepic, était la réunion du moulin Radet et du Blute-Fin de la famille Debray massacrée par les Cosaques en 1814. Dans les années 1830, il était devenu une guinguette, un jardin dansant. Depuis la barrière Blanche, les grisettes parisiennes montaient danser tout là-haut. Renoir a peint sur place, jour après jour, sa grande toile « Le bal du moulin de la Galette » (1876). En 1914, le Blute-fin a été sauvé de la destruction par les Amis du Vieux Montmartre. Terrains et moulins sont inscrits aux monuments historiques, depuis juillet 1958. Restauré en 1978, il abrite, aujourd’hui, un restaurant.
Moulin-Rouge, 82 boulevard de Clichy. Joseph Oller et Charles Zidler ouvrent pour l’exposition universelle de 1889, sur l’ancien bal de la Reine Blanche, un bal avec un grand jardin et différentes scènes. Dans une de ses pattes, un éléphant creux en stuc de l’exposition de 1889 offrait des spectacles réservés aux messieurs.
Ses danseuses venaient du Moulin de la Galette et de l’Elysée-Montmartre, parmi elles la Goulue, Nini Pattes-en-l’air, Rose Ponpon et Jane Avril qui eut une liaison avec Auguste Renoir et Alphonse Allais.
Le bal est devenu La Locomotive dans les années 1960, transformée en 1986, en grande discothèque sur plusieurs niveaux. David Bowie sera le premier à s’y produire. Repris par le Moulin-Rouge, elle est depuis 2010, la Machine du Moulin-Rouge.
L’Elysée-Montmartre, 72 boulevard Rochechouart. En 1807, La famille Serres crée un jardin dansant avec des attractions de fête foraine. Face à la concurrence, le concept est revu avec un restaurant, une salle de jeu et une salle de bal couverte de 1000m2sans colonne et un grand jardin. Le bal des Quat’z’Arts y trouvait l’espace qui lui était nécessaire avec ses fêtes costumées dénudées. En 1894, dans son jardin après un incendie est construit le Trianon,au n°80.En 1897, bal et spectacles sont séparés.
On danse également à la Boule Noire ex. bal de la Belle-en-Cuisses, boulevard Rochechouart. Une maîtresse de Paul Barras, une femme galante ouvre en 1822, dans un simple hangar un bal dont l’enseigne était blanche à l’origine. En 1887, le café-concert la Cigale y est construit et le dancing va s’installer en sous-sol et aura sa propre entrée. En 1894, La Cigale a un nouveau bâtiment. Willette réalise la grande fresque de la salle. En 1924, le comte de Beaumont y organise « les soirées de Paris » des spectacles préparés avec Cocteau, Picasso, Braque, Derain, Poulenc, Darius Milhaud et Erik Satie. Les GI’s noirs s’y retrouvent à la libération en 1944 et y jouent du jazz. Philippe Stark lui a donné un nouveau look, en 1987.
Le Bal Tabarin, rue Victor Massé. Le musicien Auguste Bosc l’ouvre en 1904. Le tout-Paris s’y rend pour ses concours « de nuque, de jambes, d’épaules et autres parties du corps», ses bals costumés, ses défilés. Les nouvelles danses Tabarinette, Pilou Pilou, Cake Walk… étaient présentées par les « Darlings ». Il est vendu en 1928 à André Sandrini qui le transforme. Il meurt dans un accident de voiture, en 1949. Racheté par les frères Clérico du Moulin-Rouge, il fermera en 1953 et sera détruit en 1966.
Dans les cabarets et café-restaurants on boit, on rit, on se divertit, le nu s’installe
La Gaité Rochechouart,15 boulevard Rochechouart. En 1867, un certain Flécheux avait installé dans un hangar, tables, chaises et estrade. Le lieu va devenir un Music-Hall. En 1876, sa propriétaire est la chanteuse Emilie Bécat créatrice du style épileptique. Des artistes oubliées s’y sont produites, d’autres célèbres comme Mistinguett qui y débuta ou encore Fréhel et Colette. En 1923, un incendie détruit le théâtre qui sera reconstruit. Comme d’autres salles des boulevards, le music-hall est devenu un cinéma, remplacé aujourd’hui par un commerce.
La place Pigalle demeurait la frontière du quartier galant et artiste. Lorettes, modèles, peintres, rapins et gens de lettres fréquentaient le café de La nouvelle Athènes au n°9. A l’étage après le restaurant le Monaco, Manuel Pizarro donna des cours de tango ; suivi de strip-tease avec le Sphinx puis le Narcisse. Le grand café de la place et son tintamarre était devenu Le Rat mort au n°7 fréquenté par des prostituées : hétaires, cabrioleuses, mistronneuses, des femmes brelantières. Rimbaud y taillada la main de Verlaine lors d’un jeu de couteau. Dans les années 1930, Pigalle s’est imposé comme le centre de la pègre (terme du XIXe siècle). Le mot Milieu date des années 1920-1925. Citons également, l’abbaye de Thélème (n°1) inaugurée en 1886 à l’ambiance paillarde et rabelaisienne avec ses moines et ses religieuses. Durant l’Occupation, l’Abbaye, rebaptisée le petit Chapiteau puis le Chapiteau, est devenu un repaire « chic et cher » des auxiliaires de la Gestapo, notamment de Lafont, chef de la Carlingue(Gestapo française). A la libération, lui succède un cabaret de nus « les Naturistes ». Citons également la Folie Pigalle (n°11), en 1846, elle réunissait des ateliers d’artistes. Cinéma dès 1908, en 1958, Les Folies-Pigalle se mettent au nu avec Monique Monte qui se dévêtait sur le dos d’un pur-sang. C’est aujourd’hui une boîte de nuit.
Place Blanche où se trouve le Moulin-Rouge citons les trois cabarets aux façades et décors de l’au-delà.
Au n° 53, le Ciel avec Saint Pierre jumelé à l’Enfer avec Méphistophélès créé en 1892 au n°34, où s’installera ensuite Le Néant dans un décor macabre avec cercueils, croque-morts, ossements. Au n°100 boulevard de Clichy, en 1910, s’ouvre la Truie qui file, elle se transforme en Araignée, Porc-épic, Épatant et Cabaret des Truands aux spectacles avec repas casse-croûte (avec des frites) et en 1922, les Deux Ânes commencent à braire.
On y chantait, on y chante encore
Le Lapin Agile, 4 rue des Saules. A l’origine en 1860, ouvre Au rendez-vous des voleurs, suivi du Cabaret des Assassins (1869). Il sera un temps « A ma campagne » avec l’ancienne danseuse de Cancan la Belle Adèle (1886). L’enseigne peinte par André Gill (1879-1880), le lapin qui saute de la casserole, Lapin à Gill puis Lapin Agile donnera son nom au cabaret. En 1913, Aristide Bruant l’achète pour éviter sa destruction et la construction d’un immeuble. Il le confie à Frédé (Frédéric Gérard) qui va en devenir l’âme avec son âne Lolo artiste peintre occasionnel parrainé par Dorgelès. Aujourd’hui, encore des veillées chantantes y sont organisées.
Le Chat noir, au 84 boulevard Rochechouart. Le peintre Rodolphe Salis créa l’établissement fin 1881. Willette en a dessiné l’enseigne. Attention le Caveau du Chat Noir ouvert par le chanteur Jean Fagot, au 68 boulevard de Clichy, avec l’autorisation de la veuve, après le décès de Salis, s’attribuait la gloire du vrai Chat noir en supprimant le mot caveau de sa promotion.
Le Mirliton,84 boulevard Rochechouart. Aristide Bruant, en 1885, achète à Salis la salle du boulevard Rochechouart lorsque Salis fuit les Apaches, et part s’installer rue Victor Massé. Bruant y rendra populaire ses chansons.
On chantait aussi avec Henry Fursy animateur du tréteau de Tabarin, il avait repris le second local de Salis, puis créait la boîte à Fursy qui proposait également un bal voisin de Tabarin.
Le cabaret des Quat’z’Arts, 62 boulevard de Clichy. Les chansonniers Jehan Rictus en 1895 et Lucien Boyer auteur de l’hymne officiel de la République de Montmartre (1896) y ont débuté.
Brigitte Heurtaux-Perdrix
Comment posted on 11-25-2022Bonjour, je découvre votre site, je ne l’ai pas encore parcouru dans sa totalité. Le cabaret « Le Pichet » à Montmartre n’y est pas mentionné apparemment. Existe-t-il toujours ? Je vous pose cette question car ma maman -Réjane Heurtaux- alors âgée de 17-18 ans y a chanté. C’était en 1948 – 1950. Elle fut la première « Pichette ». Le directeur de l’époque était assez connu dans le métier, malheureusement je ne me rappelle pas son nom. Y a-t-il des traces de cette période ? Merci de votre réponse. Recevez mes salutations les meilleures.